Traduit de l’anglais par Nikhita Obeegadoo
Quatre décennies plus tard, Mlle Clairon, l’une des plus célèbres actrices du du XVIIIe siècle, évoquera dans ses mémoires les troubles financiers auxquels la Comédie-Française dut faire face à la fin des années 1750. « Nous étions pauvres, hors d’état d’attendre ce qui pouvait nous être dû. Les semainiers allaient, toutes les semaines, chez M. de Boulogne [sic], alors contrôleur-général, solliciter le paiement de la pension du roi, et n’obtenaient rien. » Clairon en arriva même à se rendre en personne, avec sept de ses camarades, auprès de Boullongne : « Le ministre m’aperçut, éloigna la foule qui l’entourait, et vint me demander ce qui m’amenait. Ma réponse fut : Le désespoir, monseigneur, où nous réduisent nos besoins et vos refus1 ». Jean de Boullongne, comte de Nogent, fit office de contrôleur-général pendant moins de dix-huit mois, du 25 août 1757 au 4 mars 1759, précisément lorsque les comptes de la Comédie-Française basculèrent dans le rouge. Bien que les mémoires de Clairon ne soient pas toujours fiables, il n’en est pas moins révélateur que la comédienne fasse de cette période un moment particulièrement difficile.
La fin des années 1750 nous offre un aperçu privilégié de l’administration financière de la Comédie-Française.2 Alors que les registres journaliers des recettes du théâtre ont été conservés pour la période allant de 1680 à 1793 (avec l’exception du registre perdu de 1739–40), pendant cinq exercices financiers, d’avril 1755 à mars 1760, les administrateurs de la Comédie-Française tiennent aussi des relevés mensuels des dépenses3. Ces registres nous permettent d’établir un ensemble de données particulièrement détaillées concernant les dépenses, les bénéfices et les pertes de la troupe, ainsi que les dividendes payés aux acteurs et aux actrices4. Pendant la période qui suit, à partir de la saison 1760–61, les Comédiens du roi abandonnent les comptes mensuels au profit de comptes annuels qui, bien que moins détaillés, sont indispensables pour comprendre le rétablissement financier du théâtre après 17605. De plus, suite au décret en Conseil du 18 juin 1757, la troupe approuve le 9 juin 1758 une révision complète de ses règlements sous forme de nouveaux articles d’incorporation qui, avec les procès-verbaux des réunions d’assemblée hebdomadaires, offrent un descriptif précis des procédures administratives internes du théâtre6.
La fin des années 1750 est une période d’autant plus intéressante qu’elle correspond au plus fort de la guerre de Sept Ans entre l’Angleterre et la France, qui commence officieusement en 1754 et officiellement en mai 1756 avec la déclaration de guerre britannique. Dans la France du XVIIIe siècle, les guerres majeures ont tendance à engendrer des périodes de ralentissement économique. Le coût de la guerre perturbe les marchés de capitaux et conduit l’archaïque système fiscal de la monarchie au bord de la faillite, comme en novembre 1759, lorsque Étienne de Silhouette, successeur de Boullongne au poste de contrôleur-général, doit émettre une défaillance majeure sur les dettes du roi. La marine britannique, supérieure à celle de la France, saisit des navires marchands français et ferme les voies maritimes au commerce français, nuisant ainsi au commerce national, étranger et colonial.
Entre 1757–58 et 1761–62, après avoir déduit les dividendes payés aux acteurs et aux actrices, la Comédie-Française perd de l’argent chaque année. Ce déficit est tout autant le résultat d’une augmentation des dépenses que d’une baisse de revenus. D’après les données, la troupe expérimente alors de nouvelles stratégies dans ses choix de programmation, dans le but d’attirer un public plus conséquent. Néanmoins, le rétablissement financier qui s’opère à partir de 1761 environ semble plutôt procéder d’une diminution des coûts que d’une hausse des recettes de la vente des billets. La crise contraint la troupe à procéder à un certain nombre de changements dans la gestion, allant d’expédients à court terme à des réformes de long terme. Une fois la guerre terminée, le théâtre se révèle être mieux administré qu’auparavant et sa stabilité financière, restaurée.
Gérée comme une entreprise, la Comédie-Française opérait selon le principe de partage de bénéfices : les bénéfices mensuels étaient redistribués en tant que dividendes (parts) aux acteurs et aux actrices. Comme l’a montré Lauren R. Clay, si un tel modèle d’entreprise avait été la norme pour les théâtres français aux XVIe et XVIIe siècles, il était déjà inhabituel au XVIIIe siècle. Le capital de la Comédie-Française consistait en vingt-trois actions (qui, comme les dividendes, étaient désignées sous le nom de parts) qui ne circulaient que de manière interne. Lorsque de nouveaux acteurs et de nouvelles actrices rejoignaient la troupe, chacun(e) achetait soit l’action, soit une partie de l’action d’un acteur ou d’une actrice qui partait à la retraite. Pour une part complète, le nouveau membre payait au membre sortant une somme fixe de 8 730 L 15 s 5 d, ainsi qu’un paiement additionnel de 4 400 L qui n’était pas techniquement considéré comme faisant partie du prix d’achat, ce qui faisait un total de 13 130 L 15 s 5 d. Un jeune acteur ou une jeune actrice, bien sûr, ne disposait pas d’un tel capital d’investissement ; aussi le théâtre lui avançait-il le prix de sa part sur la réserve de liquidités de la troupe, comme un prêt sans intérêt que le nouveau membre remboursait ensuite en versements annuels de 1 000 L, cette somme étant déduite de sa rémunération7.
L’administration de la Comédie-Française était si remarquablement démocratique qu’un observateur de l’époque la décrit comme une « république ». Les décisions importantes étaient prises lors de l’assemblée hebdomadaire de la troupe qui se tenait chaque lundi matin à onze heures. Les acteurs et les actrices recevaient un honoraire (jeton d’assemblée) pour leur présence à ces réunions, d’une somme initiale de trois livres par session, qui fut augmentée à six livres à partir du 21 novembre 1757. Étant donné qu’aucun membre de la troupe ne pouvait posséder plus d’une part, et que nombreux étaient ceux qui possédaient seulement une fraction de part, le nombre de membres qui possédaient des parts et qui pouvaient donc assister à ces réunions fluctuait entre vingt-six et vingt-huit. Tous recevaient le même honoraire et leur vote avait le même poids, indépendamment de leur sexe ou de l’importance de leur part. La séance était présidée par le semainier, un poste aux pouvoirs exécutifs qui alternait chaque semaine entre les hommes de la troupe, avec l’aide des deuxième et troisième semainiers, qui officieraient comme semainier dans la quinzaine suivante. Les autres acteurs et actrices s’asseyaient autour de la table par ordre d’ancienneté. Des réunions extraordinaires étaient convoquées lorsque l’entrée d’une nouvelle pièce au répertoire était en jeu, et pour ce type de réunions les acteurs et les actrices recevaient un honoraire (jeton de lecture) de trois livres. Jusque dans les années 1750, le vote au sujet des nouvelles pièces s’effectuait au moyen de haricots – un haricot noir signifiant un refus, un haricot blanc valant pour acceptation, et un haricot marbré, pour « acceptation avec révision » – mais en 1769 ce système fut remplacé par un avis écrit par chaque membre du comité8.
En sus de l’indemnité reçue pour leur présence aux réunions d’assemblée, les membres de la troupe étaient rémunérés sous d’autres formes, certaines figurant clairement dans les registres des dépenses, alors que d’autres sont mal documentées. Pour chaque jour où ils jouaient à Paris, les acteurs et actrices recevaient une indemnité, appelée feu car destinée à payer les bougies à la cire9. Initialement fixés à une livre par représentation, indépendamment de l’importance du rôle joué, les feux furent augmentés à deux livres par représentation à partir de décembre 1757. Pendant la haute saison, les acteurs et actrices se déplaçaient aussi à Versailles plusieurs fois par mois afin de jouer devant le roi et sa cour. Bien que la Comédie-Française ne fût pas payée pour ces représentations, le roi rémunérait les acteurs et les actrices à hauteur d’un feu de six livres par jour, et le théâtre offrait un préciput à celles et ceux qui ne pouvaient participer. Jusqu’à la fin des années 1750, le théâtre payait chaque année aux actionnaires un bonus de Nouvel An (étrennes) de 300 L par action, et au cours de l’année distribuait de la même façon 100 L supplémentaires par part et par mois, désignées par le terme établissement et considérées comme l’intérêt perçu sur les fonds investis dans les parts. Le roi donnait aussi à la Comédie-Française une pension annuelle de 12 000 L qui était redistribuée aux actionnaires proportionnellement à l’importance de leur part. Les acteurs et les actrices pouvaient prendre leur retraite après vingt ans de service, ou dans certains cas quinze ans, au terme desquels, en plus du remboursement du prix d’achat de leur part, le théâtre leur payait une pension annuelle à vie de 1 000 L10.
L’élément le plus conséquent des rémunérations des acteurs et des actrices était, de loin, le dividende, qui dépendait majoritairement des bénéfices à l’entrée, et qui leur donnait donc un intérêt direct dans le succès financier du théâtre. Au cours des cinq saisons de 1755–56 à 1759–60, les dividendes constituèrent presque 60% des rémunérations perçues par les acteurs et les actrices11 [Fig. 1]. Les dividendes varièrent beaucoup sur le long terme et manifestent même une volatilité considérable d’année en année [Fig. 2]. Relativement élevés avant 1720, ils chutèrent entre 1720 et 1740, puis remontèrent soudainement au niveau prometteur de 4 746 L par part durant la saison 1750–51. Au cours de la décennie suivante, ils se stabilisèrent à un niveau qui, bien qu’assez élevé par rapport aux décennies précédentes, devait paraître faible en comparaison de ce qu’ils avaient été en 1750–5112.
Dans ses Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations (1776), Adam Smith observe que, en raison de l’opprobre moral jeté sur eux pendant le XVIIIe siècle, les comédiens et comédiennes étaient nettement mieux payés que d’autres qui exerçaient dans des champs artistiques plus honorables. En effet, les acteurs et les actrices étaient en France marginalisés, autant par l’excommunication et la privation du droit de vote que par le préjugé commun que Mlle Clairon fustige comme « l’infamie qu’on attache à mon état13 ». Au-delà de leur travail et de leur talent, ils devaient donc être dédommagés pour le « discrédit » qu’ils assumaient, d’autant que cette mauvaise réputation avait aussi l’effet de décourager l’entrée dans la profession, réduisant ainsi la compétition. « Au premier coup d’œil, cela semble absurde », écrit Smith, « que nous méprisions leurs personnes et que malgré cela nous récompensions leur talent avec la plus grande libéralité. Et pourtant, c’est parce que nous faisons le premier que nous devons nécessairement faire le second ». Les données comptables de la Comédie-Française confirment ce que dit Smith. Si les revenus variaient selon les acteurs, dans les années 1750 un membre de la troupe qui possédait une part entière pouvait s’attendre, avec toutes ses sources de revenus, à recevoir environ 5 000 L par an, et à partir des années 1780, les dividendes seuls dépassèrent largement les 10 000 L. Pour ne prendre qu’un point de comparaison, au début de la Révolution les professeurs les mieux payés de l’Académie royale de peinture et de sculpture gagnaient seulement 1 200 L par an. Parmi les artistes, les gens de théâtre composaient donc une élite économique, mais une élite ostracisée qui, à l’instar des bourreaux du pouvoir royal, était formellement exclue de toute fonction publique comme de la communion chrétienne14.
Si l’on regarde les données mensuelles pour la période 1755–1760, on obtient un tableau beaucoup plus clair de la manière dont les dividendes étaient administrés [Fig. 3]. À la fin de chaque mois, les comptables de la Comédie-Française calculaient les revenus et les dépenses du mois, puis effectuaient une soustraction afin d’arriver au surplus net. Lors de l’assemblée hebdomadaire, la troupe décidait la part de ce surplus qui serait allouée à leurs propres dividendes. Les revenus du théâtre étaient généralement bas au printemps et un peu plus conséquents l’été, culminant en automne et en hiver, et les dividendes suivaient la même courbe saisonnière. Nous pouvons supposer que les acteurs et les actrices apprirent à économiser leurs revenus lors des saisons les plus rentables afin de pouvoir faire face aux saisons basses. Occasionnellement, lorsque les profits du mois étaient inhabituellement élevés, plutôt que de distribuer la somme entière en dividendes, la troupe en mettait prudemment de côté une portion, comme ce fut le cas en mai et en août 1755, en janvier et en février 1756, et en février, mars et août 1757. De cette façon, elle consolida sa réserve de liquidités, qui était gérée à ce moment-là par l’acteur retraité François Baron et qui apparaît dans les comptes de dépenses sous le nom de caisse de M. Baron15. Comme les dividendes ne pouvaient être inférieurs à zéro, lorsque les bénéfices se transformèrent en pertes en mars 1758, non seulement les acteurs et actrices ne reçurent pas leurs parts, mais ils furent aussi forcés de puiser dans la réserve afin de subvenir aux autres dépenses. De même, pendant les mois de bas profits, la troupe utilisait occasionnellement sa réserve de liquidités afin de verser les parts, comme ce fut le cas en juillet 1757 et en septembre 1758.
À la fin des années 1750, pendant les saisons 1758–59 et 1759–60, la Comédie-Française fit face à de sérieuses difficultés financières, les profits ne suffisant plus à subvenir aux dividendes des acteurs et des actrices. En 1757, lors de ce qui fut à proprement parler un sauvetage financier, le roi remboursa la dette ancienne de la troupe, d’un montant de 276 023 L, mais cette aide financière n’améliora pas vraiment la gestion quotidienne du théâtre16. En 1758–59, la troupe réussit à s’en sortir en puisant dans sa réserve de liquidités, mais en 1759–60, alors que la réserve se tarissait, les pertes devinrent critiques. Les comptables de la Comédie-Française classifièrent les dividendes en dépenses, et chaque mois ils soustrayaient la somme totale des dépenses, y compris les dividendes, de l’ensemble des revenus, afin d’obtenir la variation nette de la caisse de M. Baron [Fig. 4]. Pendant la saison 1758–59, la troupe vit sa réserve de liquidités diminuer de 19 220 L, et en 1759–60 de 18 633 L additionnels. Aucune entreprise ne peut tenir longtemps sur ce modèle. Les registres de la Comédie-Française fournissent des preuves incontestables de la gravité de la situation.
Les procès-verbaux des réunions d’assemblée hebdomadaires montrent qu’en 1759, la troupe ne pouvait plus rembourser ses dettes et fut contrainte à plusieurs occasions de renégocier les termes de ses emprunts auprès de ses créanciers. En septembre 1759, lorsque Mlle Mellier voulut être payée pour un billet à ordre d’une valeur de 3 150 L qu’elle avait reçu au mois de février, l’acteur et semainier du moment Pierre-Louis du Bus Préville lui expliqua que « les circonstances du temps présent jointes aux dépenses excessives et extraord.res qu’il a éte necessité de faire depuis louverture du theatre ne permettent pas quant a present le remboursem.t de lad somme ». Melier lui offrit de convertir l’obligation en une rente viagère à 10% l’année, payable trimestriellement, que la troupe approuva et que leur notaire, Nicolas de Savigny, formalisa dans un nouveau contrat. En novembre, Savigny lui-même fit remarquer que la Comédie-Française lui devait 18 000 L pour services rendus mais qu’il était disposé à effacer 3 000 L, et la troupe trouva le moyen de transférer la dette restante de 15 000 L au bureau des Menus Plaisirs. La troupe devait encore 15 000 L aux frères Venet, que le semainier Henri-Louis Lekain réussit à renégocier en une série de paiements pendant les deux années suivantes. À la fin du mois de décembre, le semainier Charles-Etienne Botot Dangeville convainquit un autre créancier, M. David, qui comme Melier avait reçu en février un billet à ordre pour 3 150 L payable en septembre, de se contenter de 1 200 L pour le moment et de percevoir le reste dans une série de versements au cours de l’année suivante17.
La Comédie-Française n’avait pas non plus les moyens de racheter les parts des acteurs et des actrices au fur et à mesure qu’ils ou elles prenaient leur retraite. En août 1760, la troupe ne disposait pas des 13 130 L 15 s 5 d requis pour racheter la part de Marie-Geneviève Dupré Grandval, qui avait pris sa retraite au mois d’avril. Elle dut pour cela emprunter 12 000 L sur un terme de six ans auprès d’une dénommée Marie-Marguerite Perdu, une créancière suggérée par Grandval elle-même. En octobre 1760, la troupe dut vendre quelques-uns de ses actifs financiers afin de pouvoir racheter la part de l’actrice Marie-Pauline Dumont Lavoy, qui avait pris sa retraite dix-huit mois plus tôt. Les Comédiens-Français décidèrent de vendre des obligations royales (contrats sur les États de Bretagne) d’une valeur nominale de 15 000 L et, conscients qu’ils recevraient bien moins que ce montant sur le marché actuel des obligations à cause de la récente banqueroute royale, ils sollicitèrent les Menus Plaisirs afin que ce bureau couvre la perte. L’année suivante, en décembre 1761, il manquait à la Comédie-Française les fonds nécessaires au rachat de la part de l’actrice Marie-Hélène Lamotte et de la demi-part de Marie-Jeanne Lemaignan Brillant. Comme Lavoy, elles avaient toutes deux pris leur retraite en avril 1759. À cette époque arrivèrent un grand nombre d’autres factures que le théâtre ne pouvait également pas payer, y compris les 12 000 L du paiement retardé aux frères Venet, que la troupe avait déjà renégocié en novembre 1759, et un billet à ordre d’un montant de 2 625 L dû à la veuve Duchemin. En désespoir de cause, la troupe décida de céder les obligations royales d’une valeur nominale de 120 000 L à l’administration hospitalière en guise de paiement de la redevance et d’utiliser sa réserve de 32 471 L 2 s 6 d, initialement mise de côté pour les impôts, pour payer ses dettes18.
Un autre aperçu des difficultés financières du théâtre nous est offert par une pratique de comptabilité singulière que la Comédie-Française adopta pendant cette période [Fig. 5]. Quand les dépenses mensuelles et les dividendes dépassèrent les revenus, elle traita les fonds avancés sur la réserve de liquidités comme un emprunt à taux zéro avec un terme d’un mois seulement. Le mois suivant, la troupe remboursait l’emprunt, du moins sur papier, en l’inscrivant comme une dépense. Si en fait elle manquait de fonds pour rembourser l’emprunt, elle empruntait ensuite cette même somme, et la considérait à nouveau comme une dépense le mois suivant. Les remboursements de ces prétendus emprunts, cependant, ne furent jamais inscrits dans les comptes en tant que revenus. Au fur et à mesure que cette « dette » accumulée envers la réserve du théâtre croissait, elle fut notée en tant que dépense mensuelle récurrente, sans qu’aucun revenu ne lui corresponde. Afin que l’on puisse saisir les véritables pertes et bénéfices du théâtre, ces dépenses artificielles n’ont pas été inclues dans les schémas présentés ici, mais elles sont la preuve du trou financier dans lequel la troupe était tombée. Bien que cette « dette » accumulée ait été minime pendant la saison 1758–59, elle augmenta rapidement l’année suivante, atteignant 12 000 L en 1760. Le traitement comme emprunts de ces avances prises sur la réserve pourrait aussi être lié à une annotation curieuse qui apparaît dans les registres des dépenses pendant les trois derniers mois de 1759. Pendant cette période, les acteurs et les actrices reçurent des dividendes mensuels de 300 L par part, que les semainiers ont répertoriés comme parts par emprunt. Malheureusement, les registres n’expliquent pas ce que cette phrase signifie, mais elle fait probablement référence au fait que les parts étaient largement puisées dans la réserve de liquidités.
Après mars 1760, les administrateurs de la Comédie-Française cessèrent de tenir des registres de dépenses mensuels et commencèrent à compiler des registres annuels, qui ont été conservés pour toute la période de 1759–60 à 1792–93 [Fig. 6]. Nous pouvons donc retracer le budget de la Comédie-Française après la crise de la fin des années 1750 et suivre son rétablissement financier au début des années 1760, même si nous ne disposons pas des détails mensuels pour la période précédente19. De 1755 à 1762, les recettes baissèrent considérablement, alors que les dépenses, dont beaucoup étaient fixes, ne diminuèrent pas autant. Pendant la saison 1759–60, les frais fixes du théâtre, qui comprenaient les salaires des employés et les pensions des retraités ainsi que certains impôts et redevances, s’élevaient à précisément 92 896 L 10 s par an, soit 30% des dépenses totales (sans compter les dividendes)20. Avec la baisse des revenus, les bénéfices chutèrent aussi, suivant une diminution similaire à celle des recettes. Si les acteurs modérèrent alors un peu leurs demandes de rémunération, ils s’octroyèrent néanmoins des parts à hauteur d’un montant que leurs faibles profits ne pouvaient couvrir, appauvrissant ainsi de manière importante la réserve de liquidités au cours des trois saisons de 1758–59 à 1760–61 [Fig. 7 et Fig. 8].
Il y a de bonnes raisons de supposer que ces pertes financières pendant la guerre de Sept Ans ne furent pas propres à la Comédie-Française, mais qu’elles correspondaient à une dépression plus générale de l’économie française, qui contraignit le public parisien à réduire ses dépenses sur des articles de luxe comme les billets de théâtre. En même temps que le commerce international et colonial, les revenus de la Comédie-Française chutèrent considérablement pendant la guerre, pour se rétablir ensuite solidement après que le traité de Paris fut signé en février 1763 [Fig. 9]. Une comparaison entre les recettes de la Comédie-Française et le total des exportations françaises révèle une corrélation relativement forte, avec R2=0.26 [Fig. 10]. La Comédie-Française, bien sûr, ne produisait pas pour le marché d’exportation, mais dans la mesure où les chiffres d’exportation peuvent servir d’indicateur équivalent au PIB, ils suggèrent que la dépression que nous observons dans les ventes de billets participait alors d’une crise générale21. James C. Riley affirme qu’en raison des sommets atteints par le « commerce compensatoire » immédiatement avant et après la guerre, le blocus naval ne nuisit pas directement à l’économie française22 ; il existe néanmoins des données, certes localisées mais importantes, qui suggèrent le contraire. Les données publiées sous forme de graphique par Pierre Léon montrent une forte baisse dans la production et les ventes domestiques de la draperie pendant la guerre de Sept Ans dans des villes aussi variées que Rouen, Valenciennes ou Mayenne, ainsi qu’une baisse subite des cargaisons de charbon de la Vallée de la Loire à Paris23. Pendant les mêmes années, les ventes du commerçant Nicolas-Claude Flocquet connurent un creux qui correspond à celui subi par la totalité des exportations françaises, alors qu’il ne servait que le marché domestique. Les données fragmentaires prouvent donc que les difficultés économiques n’étaient pas limitées aux industries d’exportation24.
Le rétablissement financier graduel de la Comédie-Française à partir de 1761 environ fut le fruit de plusieurs facteurs. Notamment, la troupe parvint à réduire ses dépenses fixes ainsi que le montant de ses impôts. Pendant la saison 1760–61, les coûts fixes annuels étaient inférieurs de 21 614 L à ceux de l’année précédente. La réduction la plus importante fut dans les revenus des danseurs, qui passèrent de 25 000 L à moins de 5 000 L. Les registres ne révèlent pas les raisons de cette décision, mais peut-être reflète-t-elle un changement de priorités, passant du spectaculaire à la parole théâtrale. Outre des réductions minimes de plusieurs autres dépenses, la troupe parvint à obtenir du roi l’élimination d’un impôt fixe connu sous le nom de capitation, qui s’élevait à 1 104 L par an. Plus encore, les comptes annuels montrent qu’en 1760, la Comédie-Française reçut un allègement temporaire de l’impôt qu’elle payait chaque mois à l’Hôpital-Général et à l’Hôtel-Dieu. Catégorisées comme dépenses variables, ces deux taxes ensemble représentaient environ 22% du total des recettes des billets. Pendant la saison 1760–61, les deux impôts furent exigés uniquement d’août à mars, de sorte que le théâtre opéra sans avoir à les payer pendant les quatre premiers mois de la saison, d’avril à juin 1760, ce qui représenta une économie exceptionnelle de presque 21 000 L. À partir de la saison 1762–63, la Comédie-Française parvint à réduire le taux de l’impôt dû à l’Hôpital-Général et à l’Hôtel-Dieu, qui tomba sous les 15% une fois la guerre terminée et qui passa d’un pourcentage à une somme fixe (un peu plus de 62 000 L par an) indépendante de la croissance des revenus [Fig. 11]. La troupe semble donc avoir bénéficié de ce qui s’apparente à un nouveau sauvetage financier de la part des instances politiques25.
Il faut noter que les acteurs s’imposèrent des restrictions en réduisant les rémunérations perçues hors dividende [Fig. 12]. En juin 1757, le paiement des intérêts que les sociétaires recevaient chaque mois, nommé jusqu’alors établissement, fut rebaptisé intérêt du fonds d’avance, et réduit de plus de la moitié ; il continua à baisser au cours des années suivantes. Après 1757, le théâtre n’indemnisa plus les acteurs et les actrices qui n’étaient pas invités à jouer devant le roi à Versailles. La prime de Nouvel An fut aussi éliminée après que la troupe eut reçu une gratification à la fin de 1758. L’effort fut donc de réduire les rémunérations annexes versées aux acteurs et aux actrices afin de mieux financer les parts qui, dès la saison 1761–62, furent liées plus étroitement aux profits réels. En 1763–64, la réserve de liquidités augmenta effectivement de plus de 8 000 L. Dès lors, au fur et à mesure que les profits et les dividendes devinrent presque identiques, les variations nettes annuelles de la réserve de liquidités se stabilisèrent presque exactement à zéro [Fig. 8].
Outre la réduction des coûts, la troupe a probablement cherché à renforcer ses revenus en pensant une programmation susceptible d’améliorer les ventes de billets. La base de données du Projet des Registres de la Comédie-Française (RCF) nous permet d’explorer les stratégies que les Comédiens-Français adoptèrent. La manière la plus évidente d’augmenter les revenus était de jouer plus souvent, ce qu’ils firent en effet [Fig. 13]. Pendant les quatre premières décennies d’existence de la Comédie-Française, le nombre de jours de représentation par année civile dans la salle parisienne était, en moyenne, d’environ 320, mais ce chiffre avait rapidement diminué après 1720. La Comédie-Française avait en moyenne seulement 280 jours de représentation par an dans la décennie 1730, 275 dans la décennie 1740, et 268 dans la décennie 1750. Ce chiffre augmenta subitement après 1760, avec une moyenne de 295 jours de représentation par an dans la décennie 1760, soit une augmentation de 10% par rapport à la décennie précédente26.
Une deuxième stratégie par laquelle la troupe pouvait améliorer ses ventes était de programmer un genre populaire. Le choix du genre était étroitement lié au jour de la semaine, sans être néanmoins toujours déterminé par lui. Chaque soirée comprenait généralement deux pièces, mais alors que la seconde pièce, plus courte, était presque invariablement une comédie, la pièce qui ouvrait la soirée pouvait être soit une comédie, soit une tragédie – soit, dans moins de 10% des cas, un genre plus mineur. L’Opéra, concurrent principal de la Comédie-Française, était seulement ouvert le dimanche, le mardi et le vendredi, ainsi que le jeudi pendant les mois d’hiver. La Comédie-Française avait donc un public moins conséquent ces jours-là, même si les dimanches pouvaient attirer les spectateurs qui travaillaient pendant le reste de la semaine. Joseph de la Porte explique que « les trois jours où il y a le plus de monde à la Comédie Françoise, sont le Lundi, le Mercredi & le Samedi. C’est pour ces jours-là qu’on réserve les meilleures Pièces, ou les Pièces nouvelles27 ».
La base de données RCF révèle que les tragédies étaient normalement jouées le lundi, le mercredi et le samedi, alors que les comédies étaient jouées les autres jours de la semaine. Conséquemment, les tragédies avaient tendance à rapporter environ le double des comédies, avec une moyenne respective de 1 794 L et 910 L par représentation sur la période de 1750 à 1770. Cependant, cette différence semble être en grande partie due à la programmation, et non à la popularité inhérente au genre. Si l’on tient compte du mois ainsi que du jour de la semaine, on constate que les comédies généraient en moyenne un revenu souvent plus conséquent que les tragédies sous les mêmes conditions de programmation. Le calendrier, cependant, était flexible, et la proportion totale des comédies en regard des tragédies durant la saison théâtrale varia considérablement au fil du temps [Fig. 14]. Ayant privilégié la comédie aux dépens de la tragédie pendant les premières décennies du XVIIIe siècle, la Comédie-Française tendit en 1740 à s’approcher d’un équilibre entre les deux genres, jusqu’à ce que leur fréquence arrive plus ou moins à égalité au début des années 1750. À la fin des années 1750, cependant, cette tendance s’inversa brusquement quand la troupe programma de moins en moins de tragédies et de plus en plus de comédies, lesquelles gagnèrent donc du terrain sur les jours de la semaine à fort public. Il est certes possible que la décision ait été déterminée par des considérations autant artistiques qu’économiques. Même si cette question mériterait une véritable recherche qui excède le cadre de cet article, on peut néanmoins observer que ce changement de stratégie commerciale au plus fort de la guerre de Sept Ans semble suggérer que la comédie était plus populaire que la tragédie dans ces temps de dépression économique.
Une autre stratégie possible aurait été d’avoir recours aux « classiques » du XVIIe siècle, qui en sus de la pérennité de leur popularité, présentaient aussi l’avantage de pouvoir être joués sans qu’aucun droit ne soit payé à leurs auteurs. Cependant, nos résultats montrent que ce ne fut pas là le choix de la Comédie-Française [Fig. 15]. Les dramaturges classiques les plus populaires étaient, de loin, Pierre Corneille, Molière, Jean Racine et Jean-François Regnard, mais la fréquence à laquelle leurs pièces furent jouées diminua continûment au cours du XVIIIe siècle, et la période de la guerre de Sept Ans n’aida pas à inverser cette tendance. Au contraire, au plus fort de la guerre, la troupe se tourna vers Voltaire [Fig. 16]. Pendant les saisons 1760–61 et 1761–62 (nous limitons ici aussi notre analyse à la première pièce), les pièces de Voltaire furent jouées 148 jours, beaucoup plus que pendant aucune saison précédente ou suivante. Les billets se vendirent tellement bien qu’ils générèrent 40% du total des revenus du théâtre pendant ces deux années, soit presque 268 000 L. Il n’est pas exagéré de dire que Voltaire aida la Comédie-Française à retrouver une stabilité financière.
Par un heureux hasard, la période de quatre mois pendant laquelle la Comédie-Française opéra sans impôts en 1760 coïncida avec le début d’une des pièces les plus rentables de son histoire, Les Philosophes de Charles Palissot de Montenoy, qui fut représentée devant des salles bondées pendant tout le mois de mai. Pour la Comédie-Française, le mois de mai était généralement lent, un mois à faible public ; mais en mai 1760, le théâtre gagna en brut 41 432 L, ce qui est supérieur aux revenus de tous les mois de mai précédents depuis la bulle inflationniste du Mississippi en 1720. Le 2 mai, la première de la pièce très attendue de Palissot eut lieu devant un public de presque deux mille spectateurs et rapporta 4 378 L en un seul jour. Au cours du mois, elle fut représentée treize fois comme première pièce et une fois comme deuxième pièce, avec des revenus de 33 434 L, soit 80% du total des recettes du mois.
Le prix à payer pour le succès des Philosophes, cependant, fut l’aliénation de nombreux défenseurs du théâtre dans le monde littéraire parisien. Frôlant la calomnie, la pièce de Palissot caricaturait un nombre de Philosophes importants des Lumières, y compris Denis Diderot, Jean-Jacques Rousseau, Charles Pinot Duclos, Marie-Thérèse Rodet Geoffrin et Claude-Adrien Helvétius. Palissot dépeignait les Encyclopédistes comme des esprits illogiques, immoraux, irréligieux et – au plus fort de la guerre entre la France et l’Angleterre – antipatriotiques et anglophiles. Le public savourait l’humiliation à peine déguisée à laquelle se trouvaient soumis personnages publics et le journaliste anti-philosophe Élie-Catherine Fréron accorda à la pièce un compte rendu élogieux dans son périodique L’Année littéraire. Furieux, Diderot et ses partisans convainquirent la Comédie-Française de ne plus jouer la pièce une fois le mois terminé. Étant donné sa situation financière, cependant, la troupe avait besoin d’un nouveau succès pour remplacer Les Philosophes.
Bien que Palissot fût un admirateur de Voltaire et se fût employé à le tenir à l’abri des critiques, Voltaire prit la défense de Diderot en remaniant sa pièce Le Café ou l’Écossaise, qu’il transforma en contre-attaque à l’égard de Fréron qui, sous le nom de « Frélon », devint de manière transparente le personnage négatif. Lors de la première le 26 juillet 1760 – toujours dans la période libre d’impôts – L’Écossaise généra 3 760 L de recettes. Au cours de la saison, elle rapporta un total de 45 164 L. Dans L’Année littéraire, Fréron dépeignit l’ouverture de la pièce comme une bataille où les forces de Diderot avaient triomphé sur les « gens de bon goût ». En septembre 1760, Voltaire présenta Tancrède, un plus grand succès encore, qui rapporta en brut 71 508 L en dix-huit mois, et qui donnait des chevaliers normands médiévaux une représentation positive susceptible d’améliorer la réputation du patriotisme des Philosophes28. La détresse financière des années de guerre paraît donc avoir précipité un processus au cours duquel la Comédie-Française devint plus sensible aux attentes du public et se mit à exploiter les rivalités notoires à des fins commerciales, une stratégie qui semble s’être prolongée après la guerre. De fait, en février-mars 1765, une nouvelle tragédie patriotique de Pierre-Laurent de Belloy, Le Siège de Calais – qui, ainsi que le montre Logan J. Connors, fut généralement perçue, à l’instar de la pièce de Palissot, comme une attaque contre l’internationalisme et le manque de patriotisme des Philosophes – eut l’effet similaire de faire rentrer des fonds : la vente des billets rapporta 62 707 L en seulement dix-huit représentations29.
Les registres de la Comédie-Française représentent un cas singulier pour étudier la gestion d’une institution culturelle parisienne pendant la détresse économique de la guerre de Sept Ans. En raison à la fois de la préservation de ses archives comptables et de la structure démocratique de son administration, qui fit que toutes les décisions importantes furent débattues lors des assemblées hebdomadaires, nous pouvons identifier en détail la baisse des recettes et des profits au plus fort de la guerre et retracer les mesures prises par la troupe afin de restaurer sa solvabilité. Au début, la troupe renégocia ses dettes et puisa dans sa réserve, tout en continuant à payer aux acteurs et aux actrices leurs parts à un niveau qui, certes inférieur à ce à quoi ils étaient habitués, n’en était pas moins supérieur aux profits. Peu à peu, la troupe trouva le moyen de faire baisser ses dépenses, en procédant à des réformes internes ainsi qu’en obtenant une réduction de ses impôts. À court terme au moins, c’est en diminuant ses dépenses plutôt qu’en augmentant ses revenus que la troupe retrouva sa stabilité financière. Soucieuse néanmoins d’augmenter également ses revenus, la troupe modifia aussi sa programmation, augmentant de 10% le nombre de jours de représentation à Paris par saison, mettant en scène plus de comédies que de tragédies, et recherchant de nouvelles pièces susceptibles d’attirer du public.
La Comédie-Française se tourna de plus en plus vers le scandale public, transformant des conflits entre figures de renom en matière de spectacle. Comme le signale L. Clay, « les Comédiens du roi encourageaient ce genre de rivalités parce qu’elles stimulaient leurs ventes30 ». Selon Robert Darnton, le libelle constitue un genre spécifique de littérature qui atteint une popularité extraordinaire pendant cette période, non sans effets délétères sur la culture politique française31 ; en 1760, Les Philosophes de Palissot et l’Écossaise de Voltaire importèrent le genre du libelle sur la scène du théâtre.
Grâce à la faveur du duc de Choiseul, alors ministre des affaires étrangères et protecteur du camp anti-philosophe, Palissot parvint à publier sa pièce légalement chez l’imprimeur parisien Duchesne32. La comédie de Voltaire, quant à elle, était clairement impropre pour « l’approbation et le privilège du Roi ». Imprimée à Genève chez les frères Cramer, L’Écossaise parut au cours des quatre années suivantes dans de multiples éditions provenant de lieux de publication illustres – Londres, La Haye, Amsterdam et Avignon –, avec une page de couverture prétendant qu’il s’agissait de la dernière pièce du frère de David Hume, traduite en français par un certain Jérôme Carré de Montauban. Bien que trop polémique aux yeux des censeurs du pouvoir royal, L’Écossaise demeura vivement appréciée à la Comédie-Française jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, comptabilisant un total de 127 représentations en 1788. Le libelle semble donc avoir joui d’un seuil de tolérance plus élevé sur la scène qu’à l’écrit.
Le document Excel ci-dessus accompagne l’article « Troubles financiers et stratégies commerciales à la Comédie-Française pendant la guerre de Sept Ans » de Thomas M. Luckett. Il donne accès aux données des dépenses de la Comédie-Française réunies pour cet article et correspondant à la période allant d’avril 1755 à mars 1761.